terça-feira, 10 de novembro de 2009

CINQ POINTS DE RUPTURE



« Puisqu'elle est trangressive, toute aberration doit être tenue, à l'inverse, comme émergence possible d'un autre système »
(Ricardou - « L'Or du Scarabée »).

« The Shooting », « L'Ouragan de la vengeance » dérivent d'un genre, le Western, ensemble de formes rythmiques codées promotrices d'une efficacité qui parle, tout en la refoulant, l'artificialité d'un mythe, dès lors vraisemblable, « naturel ». Ce code est régisseur de distributions constantes, entérinées par une longue complicité du tandem spectateur-créateur: le couple manichéiste Bien-Mal réparti selon les règles du jeu capitaliste.

C'est cette statique qui est remise en cause par Monte Hellman, donc l'idéologie qu'elle sous-tend consciemment ou non. Il n'est sans doute ni le premier ni le seul à procéder ainsi. Quoiqu'il en soit, cette crise, sinon l'annonce d'une véritable mutation, est en tout cas le symptôme d'une rupture.

Ce retournement n'est en rien un quelconque pastiche de genre (Mekas, ou « Spaghetti western ») qui, tout en l'inversant, participe du système qu'il distancie. Le changement d'axes opéré ici est lié au contraire à un changement d'écriture radical, qui touche en premier lieu aux fonctions de la durée. La notion de « réalisme » n'en est pas pour autant intentionnellement mise en cause (continuité - homogénéité apparente du temps; continuité des personnages par leurs motivations). Elle semble plutôt rectifiée; réimposée souverainement, purifiée des techniques instituant le western standard.

1) Le temps. Forcené. Bloc sans failles, lisse et continu. Lenteur accumulée jusqu'à l'éblouissement. Ni à-coups dramatiques, ni ruptures de tempo, ni répartition des plans en vue d'une efficience.

A l'opposé, cette persistance fascinée paraît se reproduire sans intervention d'aucune sorte, absolument seule à partir d'un centre incertain qui la diffuse et fait surgir en creux l'élan, obstiné comme elle, des motifs sur l'image. Après un quart d'heure, vingt minutes, de projection, l'espace devenu secondaire, perd de sa matérialité, de sa définition. L'image étant désormais moins une configuration déterminée que le lieu de cette force, là, sous elle, qui l'aligne. Le film, miné par cette pulsion « quelque part en dessous », par cet immense silence progressivement tendu, substitué à sa composition, perd toute stabilité et verse très vite, pour peu qu'on s'y laisse emporter, dans l'hallucinatoire.

Frustré de la stupéfaction calculée du western traditionnel, le lecteur reste libre, même déçu, irrité par ce temps qui casse le discours convenu. Il vit désormais une durée analogue à celle, lancinante, de son pouls, passivement éprouvée. Ainsi deux effets:

Le « réalisme » des deux films, après sublimation des procédés de tradition, échappe à toute pertinence. Le temps filmique, par excès de statisme, finit par indiquer son existence propre, et jusqu'à l'asphyxie.

Mais surtout ce langage neuf fait ressortir, par différence, la syntaxe institutionnelle du western et par contrecoup, parce que c'est la même chose, du film hollywoodien. Le code de naguère se démasquant - sinon s'explicitant - lorsque ses thèmes sont décodés à travers une nouvelle grille.

2) Le lieu. De ce fait, inévitable, un type original de lieu, sans rapport avec les images du western d'Epinal. Une enceinte synthétique, d'indétermination croissante, non pas signalée comme réalité artificielle mais déjà considérée comme contour arbitraire.

Des montagnes, le soleil, une cahute, des pistes, tout cela sans dénomination (celles-ci, conservées lorsque absolument nécessaires au récit, prennent de par la pénurie de signes, une dimension quasi mythique). Lieux du Tout et du Rien, fondamentaux, et qui se refusent à toute perspective anecdotique. Centres de réception flous où le mythe révèle à la fois la rigueur de son armature et l'imprécision de ses données.

3) Personnages. Les personnages de « The Shooting », de « L'Ouragan de la vengeance » parcourent un tracé, suivent une direction, dont les pulsions ne sont jamais justifiées - formulées par des motivations, morales ou autres. Les personnages, ces figures d'ombre qu'ils dessinent, vont on ne sait où, viennent d'on ne sait où, s'arrêtent on ne sait pourquoi, un point c'est tout.

Ce qui est révélé ici, c'est moins le sens de leurs conduites que, là encore, la force, point central et vecteur, « abstraction sensible », forces diversifiées, combinées en jeux multiples (par exemple sexualité - entre Millie Perkins et les trois hommes dans « The Shooting »; ou fuite en avant perpétuelle dans le temps, incontrôlable, dans « L'Ouragan de la vengeance »). Forces en tout cas qui, contrairement à la « mise en scène » toujours productrice d'une symbolique de « caractères » (et l'on sait aujourd'hui à quel type de culture appartiennent ces dénominations), sont à lire dans leur litteralité stricte de mouvements. Blocs compacts et totalisants, centres à la fois vides et pleins, personnels et impersonnels des corps. Profondeur sourde, informulée (avant la formulation) établie textuellement et matériellement, sans « mystères », sur l'écran.

4) Lecture. Le western, traditionnellement, animait des figures de base (cow-boy, tueur à gages, sheriff) à la crédibilité fondée sur une personnalisation psychologique complémentaire (anecdote, antécédents sociaux, etc.), dispensée par le dialogue et la « mise en scène ». Personnalisation situant le personnage filmique nettement en dehors; à l'extérieur de la réalité du lecteur.

Hellman, au contraire, conserve les figures de base, sinon leurs définitions complémentaires, complaisamment estompées. Un dialogue énigmatique, vide de signes. Une gestuelle fonctionnelle sans « expressivité ». L'un comme l'autre laissant ouvertes les grandes structures qui, par contre-coup, changent les perspectives de la lecture. Aucune différence d'ordre biographique n'empêchant plus l'identification, le lecteur n'est ainsi plus maintenu à l'extérieur, il pénètre dans le film, le vit en même temps qu'il se vit, s'y incarne en échos à la fois proches et lointains, familiers mais toutefois dissemblables, opaques et, cependant, clairs.

5) Le tout. Alors que, dès qu'il se parle selon une caractérisation individualisante et typique, le personnage capte la totalité de l'attention sur l'écran, en s'imposant comme plan unique et « normal » de lecture, il suffit au contraire que toute énonciation psychologique lui soit refusée pour qu'il revienne au niveau du « reste » - accessoires, paysages - et dépasse en la brisant définitivement cette stratégie perceptive alors révélée comme telle. Ainsi en est-il dans les deux films de Monte Hellman où l'acteur n'est plus qu'un poids, questionnant et mouvant en direction, une force parmi d'autres forces, à la fois spécifique et englobée.

Sébastien ROULET

Cahiers du Cinéma n° 205, outubro 1968, pp. 57-58

4 comentários:

Jesús Cortés disse...

Off the topic, pero:

ed2k: The Stranger.El Extranjero.Visconti.Dual Eng-Spa.Cine-clasico.avi.avi [1.27 Gb]

Subtítulos en inglés
http://titles.box.sk/index.php?pid=subt2&p=i&rid=224540

bruno andrade disse...

É muito estranho esse filme não estar disponível, nem digo em DVD (o que é estranho), mas pelo menos numa cópia realmente boa com o áudio original. No KG há uma cópia razoável mas com o áudio em alemão, e a outra que conhecia era justamente essa.

João Gabriel disse...

A cópia em alemão, eu lembro de ter achado ruim. Se eu não me engano, faltava 6 minutos do início!!! Mas isso no emule.

Anônimo disse...

Jesús, en inglés no se rodó, y menos aún en alemán. En algún sitio leí que se riodaba en francés, lo que es lógico adaptando a Camus con acción en la Argelia colonial, y siendo casi bilingües Visconti y Mastroianni y los demás actores franceses. Y, back to the topic, siento decir que gustándome mucho Hellman, y pese a su prestigio general, no comparto más que a medias la admiración por los 2 pequeños westerns con Nicholson, muy inferiores a cualquier Boetticher, y en esècial al más "nonsensical", "Buchanan Rides Alone"(1958). Prefiero de lejos "Cockfighter" o "The Iguana" (en su versión completa en inglés, que editó, creo recordar, Anchor Bay) y, dentro del género, "China 9 Liberty 37", que se ha editado siempre mutilada, mal transferida, sin su formato, lo menos 6 veces en USA, y nunca en Italia ni en España. Otro escándalo. Cuando además de los fans de Hellman la comprarían los de Jenny Agutter (o de ambos, como yo).
Miguel Marías

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