segunda-feira, 6 de março de 2006

La Maison de bambou

CINéCINéMA CLASSIC, 8 h 40.

par Louis SKORECKI

J'ai eu la chance de rendre souvent visite à Samuel Fuller, quand il était encore vif et drôle, dans sa villa des hauteurs hollywoodiennes truffée de mannequins militaires et de tableaux noirs en guise de storyboards. Entre 1963 et 1965, j'ai bien dû enregistrer vingt-quatre heures de conversations avec lui. L'essentiel se trouve dans deux numéros de Présence du cinéma, de loin la meilleure revue de cinéma au monde. Les Cahiers n'ont rien eu. Je me souviens d'avoir piqué une tête dans sa piscine avec l'ami Daney, l'année où il mettait ses pas dans les miens à la recherche de sensations fortes. Quelques jours plus tôt, on s'était promenés autour de la piscine de cette folle de Cukor, entouré de toutes ses copines, plus hystériques les unes que les autres. Il m'avait tendu l'une de ses chemises en se pinçant le nez, et j'avais dû l'enfiler. J'étais rouge de honte. Il faut dire que je sentais mauvais. Monter et descendre les collines de Beverly Hills à la recherche d'une maison de milliardaire (Daney n'a jamais conduit, moi non plus), ça ferait suer n'importe qui.

Fuller et l'Orient, c'est une belle histoire d'amour. Il adorait la Chine, le Japon, les geishas, les temples, les bouddhas. J'ai encore un 45 tours signé de sa main («To my friend Louis, the new wave in journalism»), sur lequel Nat King Cole chante la chanson générique de China Gate. La Maison de bambou, c'est mieux que China Gate. De tous ses films orientaux (Fixed Bayonnets, J'ai vécu l'enfer de Corée, The Crimson Kimono, Merrill's Marauders), la Maison de bambou est le plus beau. Le film a de ces accélérations, de ces éruptions de pure violence qu'on n'a jamais vues ailleurs. Fuller est unique jusque dans la manière dont il infiltre ses scénarios. Il y glisse des mouchards, des flics, des traîtres. Ici, le traître s'appelle Robert Stack. Oui, oui, l'incorruptible.

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