par Louis SKORECKI
CINéCINéMA CLASSIC, 17 h 10.
On disait que Fuller aimait l'Orient. La Chine, le Japon, les bouddhas, les geishas, il ne s'en lassait pas. Ecouter Nat King Cole chanter China Gate, accompagné par mille violons hollywoodiens, sur une musique de Victor Young et des paroles de Samuel Fuller. Les violons ont toujours raison. La Maison de bambou, c'est encore mieux que China Gate. Mieux que J'ai vécu l'enfer de Corée, Fixed Bayonnets, Crimson Kimono, Merrill's Marauders, tous les films orientaux de Fuller. La Maison de bambou a des éruptions de violence qu'on n'a jamais vues ailleurs, et qu'on n'a jamais vues depuis, ni chez Tarantino, ni chez Woo, vulgaires maîtres de ballets ou simples réalisateurs de clips longue durée. Fuller infiltre ses scénarios. Il y glisse des mouchards, des flics, des traîtres. Le traître s'appelle ici Robert Stack. Trois ou quatre ans après la Maison de bambou (1955), tout le monde regardera les Incorruptibles à la télévision, l'une de ces séries fondatrices qui marque le passage du cinéma à la télé (en 35 mm, et filmé par de bons artisans du vieil Hollywood). Robert Stack y est le flic intègre, l'intouchable.
Pour le moment, il se contente de trahir le truand qui l'aime d'amour. Lisez dans les marges de l'histoire, vous verrez ça. Cet amour est fragile, aussi transparent que les cloisons de papier que Fuller démolit avec une joie d'enfant survolté. Robert Stack en flic infiltré, Robert Ryan en truand, si vous avez un meilleur casting en magasin, je suis preneur. Même le couple Edmond O'Brien-James Cagney dans L'enfer est à lui est moins efficace. Moins lyrique, moins glamour. Trahir, c'est son truc, à Fuller. Dès son premier film, J'ai tué Jesse James, il met ses pas dans ceux de Bob Ford, le bandit qui tue Jesse James dans le dos. «Je regrette ce que j'ai fait à Jesse. Je l'aimais», dira Bob Ford en mourant. Stack aimait aussi Ryan. Ou est-ce le contraire ?
quarta-feira, 8 de março de 2006
La Maison de bambou (2)
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