sábado, 10 de dezembro de 2005

Une aventure de Buffalo Bill

Par Louis SKORECKI — 9 novembre 2005 à 04:28

Cinécinéma classic, 12 h 15.

Il fait vraiment chier ce Bruno, avait dit Jacques. Il n'en pouvait plus, la jalousie le dévorait. Caroline, offusquée par tant de familiarité, avait pâli. On voyait qu'elle serrait les dents. C'est monsieur Bruno, d'abord, lui avais-je dit en le regardant droit dans les yeux. Il est mort de toute façon, avait dit Jacques, qu'est-ce que ça change ? Ça change tout, avait dit Caroline en relevant la tête. Tristes et furieux, on l'avait planté là. Dans ces cas-là, cons qu'on est, on va au cinéma. Et si on allait voir Une aventure de Buffalo Bill, a proposé Caroline, il passe au Classik, ce vieux cinéma qui fait dancing le week-end. On est là, devant la façade en stuc, en train de faire du surplace. Elle ne bouge pas, la queue, dit Caroline, ça me met dans tous mes états. Je ne réponds pas. Tu penses à quoi ?, me demande-t-elle, à DeMille ou à monsieur Bruno ? Aux deux, je dis, il saurait parler d'Une aventure de Buffalo Bill mieux que n'importe lequel d'entre nous. Elle me demande s'il aimait DeMille. Tu veux rire, je réponds, il l'adorait. Il pensait que c'était l'un des plus grands cinéastes américains, l'égal de Griffith, de Walsh, de Tourneur. A ce point ?, dit Caroline. Oui, c'était à la fois un grand primitif et un seigneur, je dis. Monsieur Bruno ou DeMille ?, demande-t-elle. Les deux, je dis. Le silence s'installe.

A la sortie du Buffalo Bill de DeMille, on est littéralement muets. Le film ne parle pas beaucoup, nous non plus. Qu'en aurait pensé monsieur Bruno ?, demande Caroline. On essaye de l'imaginer, il arrive, il est là. C'est un documentaire sur Gary Cooper, dit-il. Il est beau comme un dieu, répond Caroline, et il le sait. Ce n'est pas ça, aurait dit monsieur Bruno, c'est un timide, une biche, presque un inverti. Tout ce que j'aime, se serait écrié Caroline. Dommage qu'il ne soit pas là.

Louis SKORECKI

Nenhum comentário:

Arquivo do blog